« Médaille d’or du concours général agricole », « médaille d’argent « médaille de bronze aux Vinalies Internationales », avouez qu’on s’y perd !
104. Oui, il y avait, en France en 2010, 104 manifestations dédiées au vin autorisées, concernant la remise de prix. Record mondial ! Mais devant cette immense concentration, une question se pose : quelle est la réelle valeur de ces médaillons qui ornent les bouteilles de vin au supermarché ? Ce vin médaillé est-il meilleur que les autres ? L’enquête mérite d’être menée.
Chaque année, des milliers de bouteilles de vins sont médaillées. Il faut dire que les concours ont un succès fou, qui ne se dément pas, bien au contraire. Dès l’année prochaine, il n’est pas exclu que le chiffre de 104 soit, depuis, allègrement dépassé. Or, si vous assistez à l’un de ses concours, vous vous rendrez compte d’une chose : les grands crus et les vins issus d’appellations prestigieuses sont étrangement absents. Etrangement, pas tellement, en fait. Ceux-là ont en effet tout à perdre et rien à gagner de tels concours : leurs millésimes sont reconnus, ils ont déjà une clientèle et ne cherche pas nécessairement la vente en masse.
Ce qui n’empêche pas des domaines importants de participer ; les vins récompensés assurent effectivement au producteur un marché et donc de négocier ses prix à la hausse auprès des distributeurs. Pour le consommateur, c’est autre chose : quelle est l’assurance que ce vin est tout simplement « bon » ?
Des ventes (extrêmement) boostées
C’est là le principal mérite de ces médailles : ils rassurent le chaland. Lorsqu’on ne s’y connait pas du tout en vin, ce qui est le cas d’une grande majorité d’individus, on est souvent désemparé dans le rayon « cave » du supermarché. Profusions de rouges, de blancs et de rosés qui nous font perdre facilement les pédales. Le marketing joue peu sur l’étiquette ; en revanche, une médaille d’or, d’argent et même de bronze provoque quasi-systématiquement une probabilité d’achat qui grimpe en flèche. C’est là le premier effet immédiat de ces concours, pour les producteur du moins, comme pour les magasins distributeurs : ils boostent considérablement les ventes.
En ce qui concerne le goût, il faut pour cela pénétrer au coeur même des concours. Qu’est-ce qu’on y découvre ? Des jurés de trois à sept personnes qui goûtent les vins généralement en une matinée, et des prix décernés par plusieurs critères, certains objectifs, d’autres moins. En effet, une médaille peut vite dépendre des conditions de dégustation ou simplement de la concurrence du jour. Si elle est faible, les vins primés seront forcément nivelés vers le bas. Même chose, cela dit, dans l’autre sens. Ainsi, au final, les vins récompensés sont généralement des vins qui se placent dans la moyenne, adaptés aux goûts du marché, et qui peuvent se boire rapidement.
En conclusion, difficile d’émettre avec certitude qu’un vin primé est meilleur que son voisin de rayon dénué de médailles. Car présenter son vin à de tels concours nécessite un coût que les petites caves locales, par exemple, n’ont pas forcément les moyens de payer. Sachez en tous les cas que le doyen et le plus sévère concours, c’est-à-dire celui qui attribue le moins de récompenses (23,5% de médailles décernées par édition), est le Concours général agricole de Paris ; mais sa privatisation, en cours, pourrait bouleverser cela dans le mauvais sens.